La tenue d’une audience publique en cas de sanctions administratives

TF, 14.11.2023, 2C_384/2022

Les garanties de l’art. 6 para. 1 CEDH s’appliquent aux procédures de sanctions administratives lorsque celles-ci portent atteinte aux droits et obligations privés de l’administré. Si l’instance de recours est le premier tribunal à traiter de l’affaire, elle doit respecter les garanties en question ; en particulier, sauf exception, elle doit tenir une audience publique lorsque l’administré en fait la demande.

Faits

L’Autorité fédérale de surveillance en matière de révision (ASR) accorde un agrément d’expert-réviseur ainsi qu’un agrément d’audit à un professionnel selon les lois sur les marchés financiers. À la suite d’un contrôle, l’ASR rend deux rapports d’inspection sur l’activité de l’expert-réviseur. Le premier concerne l’audit financier et constate des violations des règles sur l’indépendance dans l’exécution d’un mandat. Le second concerne l’audit prudentiel et constate des lacunes importantes de surveillance dans l’exécution d’un mandat.

L’ASR révoque par décision les agréments d’expert-réviseur et d’audit du professionnel pour une durée de quatre ans. Ce dernier forme recours au Tribunal administratif fédéral, lequel réduit la durée de la révocation de l’agrément à trois ans mais rejette le recours pour le reste. L’expert-réviseur forme alors recours en matière de droit public au Tribunal fédéral, qui est amené à se prononcer sur la tenue d’une audience publique dans une procédure de retrait d’agrément.… Lire la suite

La production de documents issus de procédures dont les jugements ne figurent plus au casier judiciaire

TF, 30.11.2023, 7B_215/2023*

La nouvelle loi fédérale du 17 juin 2016 sur le casier judiciaire informatique VOSTRA (LCJ) entrée en vigueur le 23 janvier 2023 laisse la possibilité aux experts, respectivement aux autorités pénales, de se référer à des pièces issues de procédures dont les jugements ne figurent plus au casier judiciaire. La proportionnalité de la mesure est garantie par le contrôle judiciaire de la décision qui doit être motivée. Vu en particulier le droit à l’oubli et à la réhabilitation, le lien de connexité et la pertinence de la condamnation antérieure doivent au demeurant être démontrés minutieusement.

Faits

En novembre 2022, un père est appréhendé à l’étranger en compagnie de ses deux enfants alors que son droit aux relations personnelles avec eux est suspendu. Il est remis le 5 janvier 2023 aux autorités suisses et est notamment mis en prévention d’enlèvement de mineur (art. 220 CP) et de séquestration (art. 183 CP).

Le Ministère public en charge de l’instruction décide de soumettre le prévenu à une expertise psychiatrique. Dans ce contexte, par ordonnance du 16 février 2023, le Ministère public ordonne l’apport de plusieurs pièces, dont notamment des pièces provenant de deux procédures pénales terminées et dont les jugements, en raison de l’écoulement du temps, ne figurent plus au casier judiciaire.… Lire la suite

L’obligation de verser le salaire en cas de fermeture d’entreprise dans le contexte du COVID-19

TF, 30.08.2023, 4A_53/2023*

Les fermetures d’entreprises ordonnées dans le cadre des mesures de lutte contre le COVID-19 ne constituent pas un risque à charge de l’employeur. L’empêchement d’exploitation qui en découle constitue une raison objective tenant en échec la demeure de l’employeur au sens de l’art. 324 CO. Partant, l’employeur n’est pas tenu de verser le salaire.

Faits

Trois enseignants travaillent dans un internat exploité par une société anonyme. En janvier 2020, les enseignants résilient leur contrat de travail pour fin août de la même année.

Suite à la fermeture de l’internat consécutive aux mesures d’urgence liées à la crise du Coronavirus, l’établissement dispense ses cours uniquement en ligne. En avril, l’internat informe les enseignants qu’il va réduire leur salaire à hauteur de la baisse de leur temps de travail résultant de la fermeture de l’établissement. Il les informe également, qu’ayant déjà résilié leur contrat de travail, ils ne peuvent pas bénéficier du chômage partiel.

Face au constat que les enseignants présentent un déficit d’heures à hauteur de 123, 129.5 et 176 heures, l’internat réduit leurs salaires des mois de juillet et août en conséquence, soit de 3’405.5, 3’599.20 et 6’406.40 francs.

Après avoir contesté la réduction, les enseignants ouvrent action contre l’internat au Kreisgericht de Saint-Gall et obtiennent gain de cause.… Lire la suite

Les newsletters et le respect de l’art. 12 lit. d LLCA

TF, 28.11.2023, 2C_1006/2022*

L’envoi indifférencié de newsletters aux clients actuels et passés d’une étude, sans leur consentement et sans tenir compte des domaines pour lesquels ils s’étaient adressés à l’étude, ne remplit pas le critère d’intérêt général prévu à l’art. 12 lit. d LLCA.

Faits

Une étude d’avocat·es et de notaires envoie à deux reprises à une société une newsletter présentant des développements législatifs et jurisprudentiels récents, sans l’avoir contactée auparavant à ce sujet. L’avocat de la société saisit l’Ordre des avocats du canton du Tessin afin de l’interroger sur la compatibilité de cette démarche avec les règles professionnelles.

À la suite de l’ouverture d’une procédure disciplinaire, l’Ordre des avocats condamne quatre avocat·es de l’étude susmentionnée à une amende disciplinaire de CHF 600 chacun·e pour violation de l’art. 12 lit. d LLCA. Saisi d’un recours, le Tribunale amministrativo tessinois annule et réforme cette décision, en ce sens que les avocat·es concerné·es ne font l’objet que d’un avertissement.

Les avocat·es exercent un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral, qui doit se prononcer sur la compatibilité des faits reprochés avec l’art. 12 lit. d LLCA.

Droit

Aux termes de l’art.Lire la suite

La contestation de fin du bail portant sur des constructions mobilières et la demande reconventionnelle en remise en état

TF, 24.10.2023, 4A_337/2022*

Des constructions mobilières (art. 677 CC) appartenant au locataire ne bénéficient pas de la protection en cas de congé concernant des baux d’habitations (art. 271 ss CO). Pour déterminer si un chalet est une construction mobilière, l’intention des parties quant au caractère temporaire ou permanent des constructions revêt une importance particulière. Par ailleurs, la demande reconventionnelle qui porte sur l’action en exclusion et remise en état de la chose (art. 267 al. 1 CO) doit être traitée lors du procès en contestation de fin du bail (art. 271 ss CO).

Faits

Dans les années 1960, l’État de Vaud conclut quatre baux avec des particuliers sur des parcelles qui se situent sur les rives du lac Neuchâtel. Les contrats autorisent les locataires à installer des maisonnettes, à condition de restituer la parcelle libre de tout aménagement ou construction en cas de résiliation. En 2019, l’État de Vaud résilie les baux des locataires pour le 1er avril 2020 ; il invite les locataires à restituer la parcelle libre de toute construction et nettoyée.

Les locataires et leurs descendants contestent les résiliations par le biais de requêtes de conciliation auprès du Tribunal des baux du canton de Vaud.… Lire la suite