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La nature de la décision de renvoi à agir devant le juge civil selon l’art. 126 al. 3 CPP

ATF 142 III 653 | TF, 30.08.2016, 4A_179/2016*

Faits

Alors qu’il conduit son scooter, un conducteur heurte un enfant âgé de 5 ans et le blesse gravement. Souffrant d’un problème d’hyperactivité, l’enfant est descendu soudainement du trottoir pendant qu’il marchait à côté de sa sœur âgée de 9 ans.

Le Tribunal de police du canton de Genève reconnait le conducteur coupable de lésions corporelles graves par négligence et, sur action civile de la mère et de la sœur de l’enfant, il le retient seul responsable de l’accident tout en renvoyant les parties plaignantes à agir sur le plan civil pour le surplus. En appel, le conducteur demande que sa responsabilité soit réduite à 70 %. Débouté, il saisit le Tribunal fédéral d’un recours en matière civile. À la forme, il se pose en particulier la question de savoir si le jugement par lequel le tribunal reconnait le principe de la responsabilité et renvoie la partie plaignante à agir devant les juges civiles constitue ou non une décision incidente. Au fond, il s’agit de déterminer le degré de responsabilité du conducteur.

Droit

Les décisions qui ne sont ni finales ni partielles sont des décisions incidentes ; il s’agit en particulier des prononcés par lesquels l’autorité règle préalablement et séparément une question juridique qui sera déterminante pour l’issue de la cause.… Lire la suite

L’effet suspensif du recours de Uber

TF, 07.01.2016, 2C_547/2015

Faits

En août 2014, Uber informe le Service du commerce du canton de Genève de sa volonté d’offrir ses services dans le canton. Les autorités genevoises mettent d’emblée en garde Uber sur le caractère illégal de ses activités eu égard à la législation cantonale en matière de transport. Malgré cette mise en garde, Uber débute ses activités en septembre 2014.

Par décision du 30 mars 2015, le Service cantonal interdit avec effet immédiat à Uber d’exercer l’activité de transport professionnel de personnes dans le canton de Genève et lui inflige une amende de 35’000 francs. Il déclare la décision comme étant immédiatement exécutoire et retire ainsi l’effet suspensif d’un éventuel recours. Sur recours de Uber, la Cour de justice refuse de restituer l’effet suspensif s’agissant de l’interdiction d’exercer l’activité, mais la restitue quant à l’amende.

Uber saisit alors le Tribunal fédéral en concluant à la restitution de l’effet suspensif de la décision qui lui interdit d’exercer l’activité de transport.

Droit

Ne portant que sur la demande de restitution de l’effet suspensif, la décision querellée est une décision incidente qui ne peut faire l’objet d’un recours au Tribunal fédéral que si elle cause un préjudice irréparable (art.Lire la suite

La demande de sûreté en procédure d’appel

ATF 141 III 554 | TF, 18.01.2016, 4A_216/2015*

Faits

Un demandeur obtient la condamnation d’un défendeur au paiement d’une somme d’argent en première instance. Le défendeur, devenu appelant, fait appel contre le jugement. L’instance d’appel notifie le mémoire d’appel au demandeur, devenu intimé, en lui informant qu’il a 30 jours pour déposer son mémoire de réponse (art. 312 al. 2 CPC).

Durant le délai de 30 jours, l’intimé dépose une demande de sûreté en garantie des dépens (art. 99 CPC). Il demande aussi à l’instance d’appel de retirer le délai de 30 jours pour répondre au mémoire d’appel et de fixer un nouveau délai de 30 jours dès le versement par l’appelant de la sûreté en garantie des dépens.

L’instance d’appel refuse de retirer le délai de 30 jours pour répondre. Contre cette décision, l’intimée forme un recours en matière civile auprès du Tribunal fédéral. Celui-ci doit se déterminer sur la question de savoir si l’instance d’appel doit retirer le délai légal de 30 jours pour le dépôt de la réponse en cas de demande de sûreté et le fixer à nouveau une fois que la question des sûretés est réglée.

Droit

Le Tribunal fédéral rappelle que le législateur a instauré un délai légal de 30 jours pour le dépôt du mémoire de réponse afin de garantir l’égalité des armes entre les parties.… Lire la suite

La recevabilité d’un recours contre le refus de retrancher une pièce du dossier pénal

ATF 141 IV 289 | TF, 29.07.2015, 1B_56/2015*

Faits

Le Ministère public rend une ordonnance pénale contre un prévenu. Celui-ci s’y oppose et demande qu’un procès-verbal d’audition effectué sans la présence de son avocat soit retiré du dossier et conservé à part jusqu’à la clôture de la procédure, comme le prévoirait l’art. 141 al. 5 CPP. Le Ministère public refuse d’entrer en matière sur la demande du prévenu qui recourt au Tribunal cantonal puis au Tribunal fédéral.

Le Tribunal fédéral est amené à se prononcer sur la question de savoir si un recours au Tribunal fédéral contre une décision refusant de retrancher un procès-verbal du dossier pénal est recevable.

Droit

En vertu de l’art. 131 al. 3 CPP, « les preuves administrées avant qu’un défenseur ait été désigné, alors même que la nécessité d’une défense aurait dû être reconnue, ne sont exploitables qu’à condition que le prévenu renonce à en répéter l’administration ».

La décision sur l’exploitation des preuves (art. 140 et 141 CPP) ne met pas fin à la procédure et constitue une décision incidente. Par conséquent, le recourant doit démontrer l’existence d’un préjudice irréparable au sens de l’art. 93 al. 1 lit. a LTF.… Lire la suite

Le droit de l’assuré de poser des questions en matière d’expertise médicale AI

ATF 141 V 330 | TF, 04.05.2015, 8C_690/2014*

Faits

Lors d’une procédure de révision initiée d’office, l’office AI du canton de Soleure demande à une rentière de se soumettre à une expertise médicale. Il lui joint une liste de questions adressées au médecin. La rentière demande à ce que des questions supplémentaires soient rajoutées à cette liste. L’office AI refuse cette requête, en raison du fait que la liste de questions ne constitue pas une décision, de sorte qu’elle ne peut être attaquée.

Le recours de la rentière est partiellement admis par le Tribunal cantonal en ce qui concerne l’obligation de l’office AI de statuer par voie de décision sur la requête de l’assuré visant à rajouter des questions supplémentaires à adresser au médecin.

L’office AI conteste cet arrêt par la voie du recours en matière de droit public.

Litigieuse est dès lors la question de savoir si l’office AI doit statuer par voie de décision sur une requête de l’assuré tendant à ce que des questions supplémentaires soient rajoutées dans la liste des questions à poser au médecin.

Droit

L’instance cantonale a estimé que la nouvelle jurisprudence fédérale a étendu les droits de participation de l’assuré dans le cadre d’une expertise médicale, ce qui justifie qu’une protection juridique soit garantie également en ce qui concerne une requête tendant à ajouter des questions supplémentaires (cf.… Lire la suite