La reprise de l’instruction suite à une non-entrée en matière

ATF 144 IV 81 | TF, 23.01.2018, 6B_1153/2016*

L’ordonnance par laquelle le ministère public ouvre une instruction suite au prononcé d’une non-entrée en matière (art. 323 cum 310 al. 2 CPP) n’est pas sujette à recours. 

Faits

Une personne se laisse convaincre d’investir USD 1’000’000 dans une société. N’ayant jamais perçu les dividendes annuels de 40 % qui avaient été prévus ni les fonds en retour à l’expiration de la durée de l’investissement, elle dépose plainte pénale auprès du Ministère public de Genève.

Celui-ci rend une ordonnance de non-entrée en matière. Huit mois plus tard, l’investisseuse sollicite la reprise de l’instruction en produisant un bordereau de pièce destiné à étayer sa plainte. Le Ministère public rend sur cette base une “ordonnance de reprise de la procédure préliminaire“. Le prévenu forme recours contre ce prononcé et obtient gain de cause.

L’investisseuse agit par devant le Tribunal fédéral en concluant à l’ouverture de la procédure. Se pose dès lors la question de savoir si le recours était ouvert contre une “ordonnance de reprise de la procédure préliminaire” (art. 323 CPP) rendue suite à une ordonnance de non-entrée en matière (art. 310 CPP).

Droit

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L’abus de droit en matière de résidences secondaires

ATF 144 II 49TF, 16.01.18, 1C_102/2017*

Dans les communes qui comptent une proportion de résidences secondaires supérieure à 20 % et lorsque la demande de résidences principales ne peut être établie (art. 14 al. 1 let. b LRS), la construction ne peut être autorisée qu’à condition que l’achat par des habitants à l’année fasse l’objet d’engagements sérieux et concrets avant même la construction. 

Faits

Le Conseil municipal de la commune de Bagnes octroie à un particulier une autorisation de construire deux chalets d’habitation à Verbier, lesquels seraient destinés exclusivement aux fins de résidence principale.

Helvetia Nostra s’oppose à la demande de permis devant les diverses instances cantonales. Selon l’association, le comportement du requérant du permis serait constitutif d’un abus de droit dans la mesure où les chalets ne seront vraisemblablement pas utilisés en tant que résidences principales conformément à la loi sur les résidences secondaires (LRS ou Lex Weber). Le Tribunal cantonal valaisan estime toutefois qu’un abus de droit ne peut être retenu, les chalets – situés à 4 minutes en voiture du centre de la station – étant accessibles toute l’année, leur typologie étant adaptée à une résidence principale et la population résidente de Verbier ayant baissé, de sorte que la demande en résidences principales est relativement modeste.… Lire la suite

La réalisation forcée d’une part de société simple

ATF 144 III 74 | TF, 08.01.2018, 5A_727/2017*, 5A_728/2017*

Le liquidateur d’une société simple désigné par l’autorité de surveillance (art. 132 LP et art. 12 OPC) agit en tant que représentant légal du poursuivi dans l’exercice de tous ses droits. L’autorité de surveillance peut lui donner des instructions. Ces instructions ne peuvent faire l’objet d’une plainte ou d’un recours. Seule la décision fondée sur les instructions est attaquable.

Faits

Deux soeurs sont propriétaires en commun de diverses parcelles. Elles forment ensemble une société simple. Dans le contexte de poursuites ouvertes contre l’une des soeurs, sa part dans la société simple est saisie.

L’office des poursuites convoque alors la débitrice et ses créanciers à des pourparlers sur le sort du patrimoine commun. Constatant l’échec des pourparlers, l’office demande à l’instance inférieure de surveillance de fixer le mode de réalisation de la part de la débitrice dans la société simple. L’autorité inférieure de surveillance constate la dissolution de la société simple et charge l’office de désigner un liquidateur. L’office s’exécute et nomme un liquidateur.

La soeur de la débitrice soumet un projet de partage en nature à l’office. Les créanciers s’y montrent favorables, mais la débitrice refuse d’entrer en matière.… Lire la suite

Le déplacement du lieu de résidence et les mesures protectrices de l’enfant

ATF 144 III 10 | TF, 6.11.17, 5A_47/2017*

Une restriction au droit de déplacer le lieu de résidence de l’enfant (art. 301a CC) par le biais d’une mesure de protection de l’enfant selon l’art. 307 al. 3 CC n’est envisageable que dans des cas exceptionnels, lorsque le bien de l’enfant est mis en danger. Pour retenir une mise en danger du bien de l’enfant, il faut que l’enfant lui-même soit menacé par un danger imminent ou un dommage.

Faits

Une mère quitte secrètement le domicile conjugal en Argovie avec ses deux enfants, alors âgés de 4 et 5 ans, pour s’installer au Tessin. Par la suite, elle dépose une requête en mesures protectrices de l’union conjugale à l’encontre de son époux, tendant notamment à la suspension de la vie commune et à l’obtention de la garde des enfants.

Le Tribunal de district de Bremgarten (Argovie) constate la suspension de la vie commune de même que son bien-fondé, attribue la jouissance du domicile conjugal à l’époux et la garde des enfants à la mère, avec l’obligation de s’installer avec les enfants dans un certain périmètre à proximité du domicile du père (soit à maximum 1,5 h de celui-ci en transports publics).… Lire la suite

La responsabilité de la banque lors du gel d’avoirs en application de la LBA

ATF 143 III 653 | TF, 20.11.2017, 4A_455/2016*

Une banque qui, de bonne foi, bloque un compte d’un client en application de la LBA ne peut voir sa responsabilité engagée. La bonne foi étant présumée (art. 3 al. 1 CC), le client qui intente une action contre la banque doit ainsi prouver la mauvaise foi de cette dernière.

Faits

Un ressortissant syrien issu d’une famille influente ouvre un premier compte bancaire auprès d’une banque genevoise en 2000 et un second en 2004. Il est d’emblée considéré comme une personne exposée politiquement.

Le 27 avril 2011, alors que la situation en Syrie commence à se dégrader, le client ordonne à la banque de transférer l’ensemble de ses actifs auprès d’une autre banque sise à l’étranger. Le 9 mai 2011, la banque genevoise informe le client qu’elle n’est pas en mesure d’exécuter l’ordre avant d’avoir procédé à une clarification interne.

Le 18 mai 2011, le Conseil fédéral adopte l’O-Syrie, laquelle prévoit le gel des avoirs de différentes personnes proche du régime syrien, dont fait partie le client. La banque bloque aussitôt les deux comptes bancaires. Le 25 juillet 2011, le client demande le déblocage de ses comptes au motif d’un achat de plusieurs parcelles de terrain pour le prix de EUR 3’000’000.… Lire la suite