La réparation du préjudice causé à un avocat par un article de presse

TF, 22.8.2019, 5A_562/2018

L’existence d’un intérêt public à la publication d’un article n’implique pas qu’il soit licite de révéler l’identité de la personne concernée.

Les actions en dommages-intérêts et en réparation du tort moral de l’art. 28a al. 3 CC sont indépendantes par rapport à l’action de l’art. 28a al. 1 CC. Dès lors, la réparation du préjudice fondée sur cette norme ne nécessite pas la formulation d’une conclusion en cessation ou en constatation de l’atteinte, même implicite.  

Faits

En décembre 2012, un journal tessinois fait paraître un article, ensuite repris par d’autres médias, selon lequel un avocat du canton se trouverait dans la tourmente après avoir été mêlé à la conclusion d’un « contrat suspect ». En février 2013, le même journal relaie un communiqué du ministère public selon lequel les soupçons visant l’avocat se sont en définitive révélés sans fondement.

L’avocat ouvre action contre diverses personnes physiques et morales impliquées dans la publication de décembre 2012 pour tenter d’obtenir une réparation de son préjudice.

Ses prétentions ayant été rejetées par les instances cantonales, l’avocat recourt devant le Tribunal fédéral, qui examine l’existence d’une atteinte illicite à la personnalité du recourant.

Droit

Aux termes de l’art.Lire la suite

Le calcul des intérêts moratoires pour les contributions d’entretien du droit de la famille

ATF 145 III 345TF, 30.04.2019, 5A_579/2018*

Les contributions d’entretien du droit de la famille sont des arrérages au sens de l’art. 105 al. 1 CO. Partant, le débiteur de contributions d’entretien en demeure ne doit l’intérêt moratoire qu’à partir du jour de la poursuite ou de la demande en justice.

Faits

En 2013, l’Obergericht bernois condamne un débiteur à verser à sa créancière une contribution d’entretien de CHF 3’000 payable tous les mois en avance. Dans le contexte d’une procédure de poursuite, le Zivilgericht du canton de Bâle-Ville prononce la mainlevée définitive pour les contributions d’entretiens non payées. Ce tribunal fixe la date de départ des intérêts moratoires à la date d’échéance de ces créances, soit au début de chaque mois.

Sur appel du débiteur, l’Appelationsgericht du canton Bâle-Ville confirme la décision de première instance. Le débiteur recourt au Tribunal fédéral, lequel est amené à déterminer à partir de quand l’intérêt moratoire pour des contributions d’entretien échues commence à courir.

Droit

Le Tribunal fédéral commence par rappeler que le débiteur en demeure d’arrérages (« Renten  ») ne doit l’intérêt moratoire qu’à partir du jour de la poursuite ou de la demande en justice (art.Lire la suite

La saisie prioritaire (Vorfahrprivileg) en cas d’avance des contributions d’entretien par la collectivité publique

ATF 145 III 317 | TF, 30.04.2019, 5A_490/2018*

Le droit à la saisie prioritaire (Vorfahrprivileg) du créancier d’aliments est strictement personnel. La collectivité publique qui avance les contributions d’entretien (art. 289 CC) ne peut s’en prévaloir.

Faits

Un père ne s’acquitte pas des contributions d’entretien dues à ses enfants. La commune compétente avance les montants correspondants, puis fait notifier un commandement de payer au père, en vue du recouvrement des montants avancés. Le poursuivi ne formant pas opposition au commandement de payer, la commune requiert la continuation de la poursuite.

L’office des poursuites procède à la saisie des revenus futurs du père défaillant, dans la mesure où ils excèdent le minimum vital. Ces revenus font toutefois l’objet d’une saisie préexistante en faveur d’autres créanciers. Faute d’éléments de preuve suffisants, il n’a pas été tenu compte de l’obligation d’entretien pour déterminer le minimum vital du débiteur lors de cette saisie antérieure.

Dans ce contexte, la commune sollicite le bénéfice d’une saisie prioritaire (Vorfarhrprivileg). Les différentes instances cantonales compétentes le lui refusent.

La commune recourt auprès du Tribunal fédéral. Celui-ci doit déterminer si la collectivité publique qui a avancé les montants de contributions d’entretien et agit en recouvrement contre le débirentier bénéficie du droit à la saisie prioritaire (Vorfahrprivileg).… Lire la suite

Le for d’une procédure d’avis aux débiteurs

ATF 145 III 255TF, 06.05.2019, 5A_479/2018*

Le for d’une procédure d’avis aux débiteurs au sens des art. 132 al. 1, 177 et 291 CC est défini par les art. 23 et 26 CPC et non par l’art. 339 CPC.

Faits

Se prévalant du fait que son ex-époux néglige son obligation d’entretien, une mère entreprend une procédure judiciaire d’avis aux débiteurs (art. 291 CC) devant les autorités judiciaires bernoises, canton dans lequel son ex-époux travaille. Se fondant sur l’art. 339 CPC, celles-ci se déclarent compétentes et donnent une suite favorable à la requête de la mère.

Sur appel du père, le Tribunal cantonal rejette la compétence des autorités bernoises car il estime que le for doit être défini selon les art. 23 et 26 CPC. La mère recourt au Tribunal fédéral, lequel est amené à déterminer si le for de l’action d’avis aux débiteurs de l’art. 291 CC se définit selon les principes décrits aux art. 23 CPC (for relatif aux actions fondées sur le droit du mariage) et 26 CPC (for relatifs aux actions en entretien) ou si c’est l’art. 339 CPC (for relatif aux mesures d’exécution) qui est alors relevant.… Lire la suite

Légitimation passive de la PPE : actio negatoria et action possessoire

ATF 145 III 121 | TF, 11.12.2018, 5A_340/2017*

Lorsque l’immeuble de base est à l’origine d’un trouble à la propriété et/ou à la possession d’un des propriétaires d’étage, ce dernier doit dans un premier temps solliciter une décision de l’assemblée des copropriétaires. Ce n’est qu’ensuite d’une décision négative de l’assemblée qu’il peut ouvrir action en cessation de l’atteinte (art. 641 CC) et/ou action possessoire (art. 928 CC). Ces actions doivent être dirigées à l’encontre des autres propriétaires d’étages, la communauté des propriétaires d’étages n’ayant pas la légitimation passive.

Faits

Des puits de lumière traversent le toit d’une propriété par étages. Un pont surplombe les puits de lumière. Ce pont est notamment emprunté par des techniciens pour accéder au “cylindre technique” du bâtiment. Le pont était initialement situé au-dessus de l’appartement no. 5.0. Par la suite, il est déplacé au-dessus de l’appartement 2.2.

L’assemblée des propriétaires d’étages décide de laisser le pont à son nouvel emplacement de façon permanente. Cette décision de l’assemblée des propriétaires d’étages est contestée en justice (art. 712m al. 2 cum art. 75 CC). A la date du présent arrêt, la procédure en contestation de cette décision est toujours pendante.

Séparément, les propriétaires de l’appartement 2.2 agissent en justice contre la communauté des propriétaires d’étage afin que le pont soit remis à l’endroit initial.… Lire la suite