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La rétrogradation de l’autorisation d’établissement du requérant délinquant

ATF 148 II 1 | TF, 19.10.2021, 2C_667/2020*

La révocation de l’autorisation d’établissement (permis C) couplée à la délivrance d’un simple permis de séjour (permis B) (« rétrogradation ») constitue une seule et même décision susceptible de recours auprès du Tribunal fédéral. Cette rétrogradation suppose un défaut d’intégration actuel et particulièrement sérieux lorsque l’autorisation en cause a été délivrée avant 2016. Ainsi, des condamnations pénales pour délits mineurs – même nombreuses – ne suffisent pas. 

Faits

Un ressortissant kosovar arrivé en Suisse en 1992 et au bénéfice d’une autorisation d’établissement commet plusieurs infractions (à la LCR et la LStup notamment) entre 1992 et 2018. L’Office des migrations du canton d’Argovie voit dans la délinquance du requérant un défaut de volonté d’intégration. Par conséquent, il décide de remplacer son autorisation par un permis de séjour (rétrogradation) valide pour une durée d’une année, étant précisé qu’en cas de récidive, l’intéressé pourrait se voir expulsé de Suisse.

Suite au rejet de ses recours successifs, le requérant forme un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral. Celui-ci est amené à déterminer si la rétrogradation de l’autorisation d’établissement est conforme au droit fédéral, notamment si elle respecte les principes ne bis in idem et de proportionnalité.… Lire la suite

La reconnaissance du statut d’apatride

ATF 147 II 421 | TF, 30.04.2021, 2C_415/2020*

Une personne sans nationalité, admise provisoirement en Suisse en raison des conditions de sécurité prévalant dans son pays d’origine, doit se voir reconnaître le statut d’apatride même si elle a droit à la naturalisation dans le pays en question, dans la mesure où il faudrait qu’elle s’y rende pour effectuer les démarches nécessaires.

Faits

De nombreux membres de la minorité Kurde en Syrie ne disposent pas de papiers d’identités et ne sont pas reconnus comme des ressortissants du pays par l’Etat syrien. Cela étant, depuis 2011, le droit local leur permet de demander la naturalisation.

Une personne d’ethnie kurde dépose une demande de naturalisation en Syrie, conformément au décret de 2011. Avant d’obtenir la nationalité syrienne, elle quitte toutefois ce pays et demande l’asile en Suisse. Le SEM le lui refuse, tout en admettant son droit à un séjour provisoire. L’intéressé dépose alors une demande tendant à la reconnaissance du statut d’apatride et à l’octroi d’une autorisation de séjour à ce titre. Le SEM rejette cette demande au motif que le requérant n’aurait pas fait suffisamment d’efforts en vue d’être naturalisé avant de quitter la Syrie. L’intéressé recourt contre cette décision auprès du Tribunal administratif fédéral puis du Tribunal fédéral, qui est amené à déterminer si les conditions de la reconnaissance du statut d’apatride sont remplies ou non.… Lire la suite

Le droit de demeurer en Suisse après la fin de l’activité économique indépendante en cas de condamnation pénale

ATF 146 II 145 | TF, 04.02.2020, 2C_534/2019*

Un ressortissant européen qui a exercé une activité lucrative indépendante en Suisse a le droit de demeurer sur le territoire au sens de l’art. 4 Annexe I ALCP, même lorsque l’exercice de cette activité a débuté après l’âge réglementaire de la retraite. Par ailleurs, des condamnations pénales passées ne suffisent pas à justifier une mesure de renvoi en l’absence d’une mise en danger actuelle et concrète de l’ordre public suisse par la personne étrangère concernée, en vertu de l’art. 5 Annexe I ALCP.

Faits

En 2008, un ressortissant allemand né en 1935 arrive en Suisse avec son épouse, également ressortissante allemande, et obtient de l’Office des migrations du canton d’Argovie (OMCA) une autorisation de séjour EU/AELE pour exercer une activité non salariée en tant que médecin. L’autorisation d’établissement lui est accordée cinq ans plus tard. En 2016, l’intéressé est condamné par le Tribunal d’arrondissement de Zurzach pour des infractions qualifiées et répétées à la Loi sur les produits stupéfiants (LStup) et à la Loi sur les produits thérapeutiques (LPTh). Suite à cela, le Département de la santé et des affaires sociales du canton d’Argovie révoque son autorisation de pratiquer, décision que confirme le Tribunal fédéral (arrêt 2C_907/2018 du 2 avril 2019).… Lire la suite

La notification d’une décision à l’étranger et l’indication des voies de droit

ATF 144 II 401

Une décision notifiée à une personne domiciliée à l’étranger doit informer cette personne de manière précise et complète, en plus des exigences de l’art. 35 al. 2 PA, si des dispositions spéciales telles que l’art. 21 al. 1 PA existent en ce qui concerne la possibilité de contester la décision. Lorsque ce devoir d’orientation n’est pas respecté, il ne peut pas être reproché au recourant d’avoir méconnu la loi. En revanche, si le destinataire est représenté par un avocat étranger, de simples instructions sur les voies de droit conformément aux exigences légales sont suffisantes.

Faits

Une résidente sud-africaine dépose une demande de naturalisation en Suisse. Le Secrétariat d’État aux migrations (SEM) rejette la demande par décision communiquée via la représentation suisse à Pretoria. La décision du SEM est notifiée le 22 janvier 2018, suite à quoi la résidente sud-africaine porte l’affaire devant le Tribunal administratif fédéral (TAF). Ce dernier n’entre toutefois pas en matière sur le recours qu’il juge tardif. En effet, la recourante a déposé son recours par “registered letter (courrier recommandé) le 30 janvier 2018 auprès d’une poste en Afrique du Sud. Le recours a ensuite été remis à la poste suisse le 23 février 2018, le délai ayant toutefois expiré le 21 février 2018.… Lire la suite

L’assignation à résidence après l’expulsion d’un étranger

ATF 144 II 16TF, 13.11.2017, 2C_287/2017*

L’assignation à résidence d’un étranger après le prononcé de son expulsion est possible même lorsque le renvoi ne l’est pas, pour autant qu’un départ volontaire soit théoriquement envisageable. 

Faits

Une décision d’expulsion est prononcée à l’encontre d’un requérant d’asile éthiopien suite au rejet de sa requête. A cet effet, l’Office zurichois de la migration lui impartit un délai pour quitter le territoire suisse et l’enjoint de ne pas quitter le territoire de la commune où il vit, mesure dont la durée est fixée à deux ans (assignation à résidence, art. 74 al. 2 let. b LEtr). L’étranger reste en Suisse malgré l’expiration du délai. Admettant partiellement un appel de l’étranger, le Tribunal des mesures de contrainte élargit au district le territoire auquel celui-ci est assigné. Contre cet arrêt, l’étranger saisit le Tribunal administratif zurichois qui annule l’assignation à résidence prononcée par l’Office zurichois.

Le Secrétariat d’Etat aux migrations recourt au Tribunal fédéral qui doit déterminer si l’assignation à résidence dans un territoire déterminé peut être prononcée à l’encontre d’un étranger expulsé même lorsque le renvoi forcé n’est pas possible.

Droit

A teneur de l‘art. 74 al. 1 let.Lire la suite