Le consentement de l’époux au transfert de copropriété en procédure de divorce (CC 201 et 204)

ATF 141 III 13 | TF, 18.12.2014, 5A_240/2014*

Faits

Deux époux sont en procédure de divorce. Le Tribunal de première instance du canton de Genève ordonne à l’époux de ne pas disposer de ses parts de copropriété sur ses biens immobiliers, sauf accord exprès de son épouse.

Malgré cette décision, l’époux fait une donation à sa fille d’une part de copropriété sur l’une de ses parcelles. S’ensuit une réquisition d’inscription au Registre foncier. Apprenant cette réquisition, l’épouse, copropriétaire de la parcelle, fait opposition. Le Registre foncier refuse l’inscription de la fille en raison du défaut du consentement de l’épouse à la donation.

La fille recourt alors à la Cour de justice, puis au Tribunal fédéral, en invoquant une violation de l’art. 201 al. 2 CC – qui prévoit la restriction de la disposition des biens en copropriété des époux – en lien avec l’art. 204 al. 2 CC – qui prévoit la rétroactivité de la dissolution du mariage au jour de la demande.

Le Tribunal fédéral doit alors trancher la question de l’application de l’art. 201 al. 2 CC à une procédure de divorce.

Droit

Le Tribunal fédéral rappelle tout d’abord que le pouvoir d’examen du Registre foncier se limite à un examen formel.… Lire la suite

La prescription des actes de pornographie enfantine

ATF 141 IV 93 | TF, 10.02.2015, 6B_1085/2014*

Faits

Le 30 novembre 2008, le peuple et les cantons ont accepté en votation populaire l’initiative « pour l’imprescriptibilité des actes de pornographie enfantine » (art. 123b Cst.). Le texte constitutionnel a été transposé par une modification du Code pénal entrée en vigueur le 1er janvier 2013 (art. 101 al. 1 let. e CP). À teneur de cette disposition, divers délits d’ordre sexuel sont désormais imprescriptibles s’ils sont commis sur des enfants de moins de 12 ans et pour autant qu’ils n’étaient pas déjà prescrits au moment de l’acceptation de l’initiative (soit le 30 novembre 2008, cf. art. 101 al. 3 CP).

En 2010, une fille porte plainte contre son père pour avoir abusé sexuellement d’elle alors qu’elle avait entre 7 et 12 ans. La même année, le Ministère public du Canton de Bâle-Ville (MP) rend une ordonnance de classement, l’infraction étant prescrite. Non contestée, la décision est entrée en force.

En juillet 2013, le MP ouvre une nouvelle procédure en estimant que l’entrée en vigueur des dispositions d’exécution de l’initiative constitue un fait nouveau (nova) au sens de l’art. 323 al. 1 CPP. Le père conteste alors cette décision devant le Tribunal d’appel, qui l’annule en admettant le recours.… Lire la suite

La révocation de la faillite lors d’une carence d’une SA (CO 731b et LP 195)

ATF 141 III 43 | TF, 19.01.2015, 4A_238/2014*

Fait

Le préposé au registre du commerce cantonal constate qu’une société anonyme n’a pas d’organe de révision. Elle en informe le Tribunal de première instance qui rend une décision imposant à la société d’engager un réviseur. Suite à l’absence de réaction de la société, le Tribunal rend un jugement qui dissout et liquide la société anonyme pour cause de carence au sens de l’art. 731b CO. Conformément à l’art. 731b al. 1 ch. 3 CO in fine, la liquidation doit s’opérer selon les règles de la faillite.

La société anonyme ouvre action en révocation de la faillite au sens de l’art. 195 LP en faisant valoir le fait qu’elle a désormais un organe de révision, de sorte qu’elle ne se trouve plus dans une situation de carence (art. 731b CO).

Devant le Tribunal fédéral, il se pose la question de savoir si une action en révocation de la faillite (art. 195 LP) est possible lorsque la faillite découle de la dissolution d’une société par le juge pour cause de carence (art. 731b al. 1 ch. 3 CO).

Droit

Le Tribunal fédéral rappelle que la doctrine rejette une application directe de l’art.Lire la suite

L’absence d’état de fait et de motivation dans la décision

TF, 19.02.2015, 4A_505/2014

Faits

Un employé ouvre une action contre son employeur devant le Tribunal des prud’hommes du canton de Genève. Par la suite, l’employeur porte plainte contre un tiers et demande à ce que la procédure prud’homale soit suspendue jusqu’au jugement pénal, ce que le Tribunal refuse par une décision exécutoire nonobstant recours.

L’employeur fait recourt à la Cour de justice et demande préalablement la restitution de l’effet suspensif. La Cour de justice statue ce qui suit : “La demande de restitution de l’effet suspensif est rejetée, le préjudice difficilement réparable allégué par la recourante n’étant pas rendu vraisemblable”. La décision contient les voies de recours possibles et une partie “Réf.” qui indique les numéros relatifs à la cause, mais ne mentionne pas explicitement la décision de première instance, ni même sa date.

Contre la décision de refus de restitution d’effet suspensif l’employeur exerce un recours en matière civile et un recours constitutionnel subsidiaire.

Il se pose alors la question de la recevabilité du recours contre une décision sur mesures provisionnelles.

Droit

Le Tribunal fédéral analyse en premier lieu la forme de la décision sous l’angle de l’art. 112 al. 3 LTF, alors même qu’aucune des parties ne discute de ce point dans son mémoire.… Lire la suite

Les données d’employés d’une banque transmises aux autorités américaines

ATF 141 III 119TF, 12.01.2015, 4A_406/2014*

Faits

En 2010, plusieurs banques suisses font l’objet d’une enquête par les autorités américaines, qui les soupçonnent d’avoir aidé des clients américains à se soustraire à leurs obligations fiscales. Ils s’en suivent différentes transmissions de données de la part des banques aux autorités américaines concernant les clients d’abord, et leurs employés par la suite. Le 4 avril 2012, le Conseil fédéral autorise les banques concernées à transmettre directement aux autorités américaines des données non anonymisées, à l’exception de celles des clients. Quelques jours plus tard, la FINMA recommande aux banques de coopérer avec les autorités américaines dans le cadre prévu par le Conseil fédéral. C’est dans ce contexte qu’une banque genevoise transmet, à l’insu de ses employés, des documents comportant les données personnelles de ceux-ci aux autorités américaines.

Deux employés de la banque prennent connaissance de cette transmission par la presse. Suite à cela, ils lui demandent de consulter les documents transmis. Celle-ci accepte cette requête, mais refuse de les laisser prendre la copie des documents.

Dans des procédures séparées, les deux employés, entretemps licenciés, saisissent le Tribunal de première instance de Genève (TPI) et requièrent la production d’une copie des documents avec indication de la date et de l’autorité destinataire de cette transmission.… Lire la suite