Entrées par Célian Hirsch

Le droit à la réplique en arbitrage international (art. 182 al. 3 LDIP)

ATF 142 III 360 | TF, 26.04.2016, 4A_342/2015*

Faits

Un groupe de sociétés de droit turc (demandeur) vend une de ses filiales à une société allemande (défendeur). Ce contrat de vente, intitulé Share Sale and Purchase Agremment (SPA), prévoit que la société allemande a l’obligation de conclure un Distributorship Agreement (DA) de durée illimitée entre sa filiale fraîchement achetée et une filiale du groupe de sociétés turques.

Trois ans après la conclusion du DA, la filiale du défendeur résilie le contrat. Le groupe de sociétés turques considère que la résiliation de ce contrat a pour conséquence l’extinction du SPA et dépose donc une requête d’arbitrage en vue de faire constater cette extinction.

Un tribunal arbitral CCI, avec trois arbitres et siège à Zurich, est constitué. Les parties se mettent d’accord sur la procédure  : le groupe de sociétés turques déposera en premier son Statement of Claim, puis le défendeur devra rendre son Statement of Defence, et, enfin, le Tribunal arbitral tranchera la question de l’effet de la résiliation du DA sur l’existence du SPA.

Après avoir reçu le Statement of Defence, le groupe de sociétés turques indique au Tribunal qu’il aimerait encore produire des témoignages ainsi qu’un avis de droit.… Lire la suite

L’opposition à l’ordonnance pénale et la restitution du délai

ATF 142 IV 201 – TF, 02,05,2016, 6B_175/2016*

Faits

Le Ministère public bâlois condamne une femme par ordonnance pénale pour escroquerie. L’ordonnance est envoyée par recommandé au nom de jeune fille de la prévenue. L’ordonnance pénale n’est toutefois pas retirée et est renvoyée au Ministère public le 17 février 2015. Le 8 octobre 2015, l’avocat, qui a entre-temps été désigné, reçoit l’ordonnance.

Le 14 octobre 2015, la prévenue forme opposition contre l’ordonnance. Elle prétend qu’elle n’a pas reçu l’ordonnance ni l’invitation à la retirer au moment du premier envoi au motif que sa boîte aux lettres n’indique plus son nom de jeune fille. Subsidiairement, elle demande une restitution du délai au sens de l’art. 94 CPP.

Le Ministère public rejette la demande de restitution du délai, refus confirmé par la juridiction d’appel, et transmet l’ordonnance pénale au tribunal de première instance pour qu’il statue sur l’opposition.

La femme exerce un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral qui doit préciser la relation entre une demande de restitution du délai et une opposition potentiellement tardive.

Droit

Selon l’art. 356 al. 2 CPP, le tribunal de première instance statue sur la validité de l’ordonnance pénale et de l’opposition.… Lire la suite

La qualité pour recourir de l’intervenant

ATF 142 III 271 | TF, 11.04.2016, 4A_580/2015*

Faits

Une société conclut un contrat d’entreprise avec un entrepreneur pour une installation sanitaire dans des locaux commerciaux. Pendant les travaux, l’administrateur de la société découvre que des flaques d’eau ont causé un dommage aux locaux. La société avertit alors son assurance immobilière de ce dommage. Cette dernière refuse de couvrir le dommage au motif qu’il aurait été causé par l’entrepreneur.

La société dépose alors une demande en paiement à l’encontre de l’entrepreneur et appelle en cause son assurance immobilière. Le juge unique décide qu’un échange d’écriture portant sur l’appel en cause (art. 82 al. 2 CPC) n’aura lieu qu’après que la procédure principale est réglée. L’assurance intervient toutefois dans la procédure principale à titre accessoire (art. 74 CPC).

Le tribunal de première instance limite d’abord la procédure à la question du principe de la responsabilité de l’entrepreneur. Le tribunal arrive à la conclusion que l’entrepreneur peut être tenu pour responsable des flaques d’eau, décision qui est renversée par le tribunal d’appel.

L’assurance immobilière exerce alors un recours en matière civile au Tribunal fédéral. L’entrepreneur s’oppose à la qualité pour recourir de l’assurance. Le Tribunal fédéral doit donc préciser si et à quelles conditions l’intervenant accessoire a la qualité pour recourir.… Lire la suite

La notification irrégulière de l’acte introductif d’instance (art. 27 al. 2 LDIP)

ATF 142 III 355 | TF, 13.04.2016, 4A_364/2015*

Faits

Une société domiciliée en Arabie saoudite introduit devant la Grand Court des Iles Caïmans une demande en paiement contre un homme d’affaires saoudien domicilié en Arabie saoudite. La Grand Court notifie l’acte introductif d’instance au domicile du défendeur par DHL et publie également l’assignation dans un journal saoudien.

Le défendeur invoque l’incompétence de la Grand Court ainsi que l’irrégularité de la notification de son assignation. La Grand Court se considère toutefois compétente et condamne le défendeur par jugement par défaut à payer au demandeur la somme de 2.5 milliards USD.

Suite à ce jugement, le demandeur introduit devant les autorités genevoises une procédure de séquestre contre le défendeur. Afin de valider le séquestre, le demandeur dépose une requête en reconnaissance et en exequatur en Suisse du jugement de la Grand Court des Îles Caimans.

Le Tribunal de première instance, ainsi que la Chambre civile de la Cour de justice déboutent le demandeur au motif que le défendeur n’avait pas été cité régulièrement devant la Grand Court (art. 27 al. 2 let. a LDIP). Ces deux instances justifient notamment leur refus en se fondant sur l’extrait du Guide de l’entraide judiciaire internationale en matière civile de l’Office fédéral de la justice (OFJ) concernant l’Arabie saoudite.… Lire la suite

L’assistance judiciaire dans une cause partiellement dépourvue de chance de succès

ATF 142 III 138TF, 09.03.2016, 4D_62/2015*

Faits

Une société coopérative dépose une demande en paiement, auprès d’un Regionalgericht bernois, contre un débiteur pour une dette dont ce dernier s’était porté garant. La demande comprend le remboursement de la dette ainsi qu’un intérêt conventionnel de 8 %.

Le défendeur dépose une demande d’assistance judiciaire qui lui est refusée au motif que sa cause est principalement dépourvue de toute chance de succès.

L’instance cantonale supérieure confirme cette décision. Le débiteur recourt au Tribunal fédéral qui doit préciser la possibilité d’octroyer partiellement l’assistance judiciaire lorsque seule une grande partie de la cause est dépourvue de chance de succès.

Droit

Le Tribunal fédéral rappelle qu’une cause est considérée comme dépourvue de toute chance de succès au sens de l’art. 117 let. b CPC lorsque les chances de gain sont considérablement plus faibles que le risque de perte du procès. Afin de procéder à cette estimation, il faut se mettre à la place d’une partie qui, en ayant des moyens financiers suffisants, déciderait de poursuivre le procès après une réflexion raisonnée. Le juge doit procéder à un examen préliminaire et provisoire au moment du dépôt de la demande.

En l’espèce, le Tribunal fédéral considère que la cause est dépourvue de chance de succès, sauf pour les frais et intérêts.… Lire la suite