La compensation des créances portant sur une peine pécuniaire et de frais de procédure avec l’indemnité accordée au prévenu (art. 442 al. 4 CPP)

ATF 144 IV 212 | TF, 18.04.2018, 6B_956/2017*

L’art. 442 al. 4 CPP ne limite pas l’autorité de recouvrement dans sa faculté de compenser des créances portant sur une peine pécuniaire et des frais de procédure avec l’indemnité accordée au prévenu pour les dépenses occasionnées par l’exercice de ses droits selon l’art. 429 al. 1 let. a CPP. L’autorité de recouvrement est en droit de compenser même si les dettes et créances résultent de procédures pénales distinctes. La limitation prévue par l’art. 442 al. 4 CPP ne concerne que les autorités pénales au sens des art. 12 ss CPP.

Faits

Un prévenu est condamné par ordonnance pénale à une peine pécuniaire ainsi qu’aux frais de procédure. Le montant dû par le prévenu au pouvoir judiciaire genevois est de CHF 6’000.-.

Dans une procédure pénale distincte de la précédente, le même prévenu est acquitté. Le Tribunal de police genevois lui accorde une indemnité de CHF 13’000.- pour les dépenses occasionnées par l’exercice de ses droits (art. 429 al. 1 let. a CPP).

Les Services financiers du pouvoir judiciaire décident de compenser les deux montants et d’accorder au prévenu un solde de CHF 7’000.-. Les instances cantonales confirment le bien-fondé de la compensation.… Lire la suite

L’action en constatation négative en cas de forum running

ATF 144 III 175 | TF, 14.03.2018, 4A_417/2017*

Dans une cause internationale, la question de savoir si une partie a un intérêt à introduire une action en constatation négative est une question de nature procédurale de sorte qu’elle est soumise au droit applicable au for saisi par le litige (lex fori). Sauf abus de droit, l’intérêt d’une partie à introduire une action en constatation négative notamment en vue de conduire un procès dans un pays déterminé dans un cas de forum running peut être pris en compte.

Faits

Dans le cadre de l’introduction d’un système de distribution sélective, un groupe horloger suisse met fin à la collaboration avec certains distributeurs qui commercent, entre autre, des pièces de rechange pour les montres que ce groupe produit.

Un distributeur anglais somme le groupe de reprendre la livraison des pièces de rechange, à défaut de quoi il introduirait une action au Royaume-Uni pour violation du droit européen des cartels. Quelques semaines après, le groupe suisse dépose une action en constatation négative devant le tribunal de commerce bernois. L’action vise à faire constater que le groupe suisse n’a aucune obligation de continuer à fournir les pièces de rechange litigieuses, ni de verser une quelconque indemnité du fait de la fin de la relation qui liait le groupe au distributeur anglais.… Lire la suite

L’indemnisation de l’avocat stagiaire pour une nomination d’office

TF, 06.03.2018, 6B_659/2017

Un avocat stagiaire ne peut facturer autant d’heures qu’un avocat indépendant. Une instance cantonale ne peut donc retenir qu’un stagiaire déploie une activité de huit heures journalières facturables afin de fixer l’indemnité qui lui est due.

Faits

Le Tribunal de police de Genève condamne un prévenu et accorde à son défenseur d’office une indemnité de CHF 1’504.50 comprenant notamment 13h50 d’activité d’un avocat stagiaire au tarif horaire de CHF 65.

La Chambre pénale d’appel et de révision rejette le recours formé par le défenseur d’office contre la décision d’indemnisation. La Chambre fonde son raisonnement sur le coût supporté par un maître de stage pour un avocat stagiaire à plein temps, lequel déploie une activité de 40 heures par semaine et effectue des heures supplémentaires non rémunérées et non compensées par son temps libre. Elle arrive ainsi à la conclusion que le coût horaire d’un avocat stagiaire est de CHF 31.70, soit un montant bien inférieur à la rémunération de CHF 65/h prévue par le Règlement sur l’assistance juridique et l’indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d’office en matière civile, administrative et pénale (RAJ/GE). Le maître de stage dégage ainsi un bénéfice important lorsque son avocat stagiaire déploie une activité dans le cadre d’une nomination d’office.… Lire la suite

La destruction des échantillons ADN (art. 9 al. 1 de la loi sur les profils ADN)

ATF 144 IV 127 | TF, 13.03.2018, 1B_425/2017*

Les motifs énumérés à l’art. 9 al. 1 let. a à d de la loi sur les profils ADN, lesquels mentionnent les conditions de destruction d’un échantillon ADN, s’appliquent de façon indépendante. Ces conditions ne sont donc pas cumulatives et l’existence d’un seul motif suffit à la destruction de l’échantillon ADN.

Faits

Lors de l’instruction d’une procédure, le Ministère public du canton du Valais donne un mandat d’investigation à la police pour auditionner différentes personnes en qualité de personne appelée à donner des renseignements. La police opère sur l’une de ces personnes un prélèvement ADN. Le rapport d’analyse démontre que cette personne se trouvait sur les lieux de l’infraction.

Cette personne, revêtant dès lors le statut de prévenu, demande au Ministère public la destruction des échantillons ADN en soutenant que cet élément constitue une preuve illicite. Le Ministère public rejette la requête du prévenu.

Sur recours du prévenu, le Tribunal cantonal ordonne le retrait du dossier des échantillons ADN. Le Tribunal cantonal a considéré que le prélèvement des échantillons n’a pas été ordonné par le Ministère public, seule autorité compétente. Il a toutefois considéré que la loi ne prévoyait pas la destruction des échantillons, dans la mesure où les conditions de l’art.Lire la suite

Le transfert de fonds d’origine criminelle à l’étranger n’est en soi pas constitutif de blanchiment d’argent

ATF 144 IV 172 | TF, 16.03.2018, 6B_453/2017*

Le fait de transférer à l’étranger des valeurs patrimoniales provenant d’un crime n’est en soi pas constitutif d’un blanchiment d’argent.

Faits

En première comme en deuxième instance cantonale, un prévenu est reconnu coupable de plusieurs infractions d’escroquerie par métier, de faux dans les titres, de gestion déloyale et de blanchiment d’argent pour avoir durant plus de 5 années détourné des fonds qui lui avaient été confiés par des investisseurs.

Concernant le blanchiment d’argent, les autorités cantonales ont considéré que cette infraction était réalisée par le fait que le prévenu avait transféré une partie des fonds litigieux vers l’étranger. En effet, selon le Tribunal cantonal de Lucerne, de ce simple fait, la traçabilité de l’argent était rendue plus difficile car le paper trail devenait plus long.

Le prévenu recourt contre sa condamnation pour blanchiment d’argent au Tribunal fédéral, lequel est amené à déterminer si un transfert de fonds vers l’étranger est constitutif d’une infraction de blanchiment d’argent.

Droit

Le Tribunal fédéral considère préalablement que la décision attaquée ne remplit pas les exigences de l’art. 112 al. 1 let. b LTF. Selon cette disposition, les décisions qui peuvent faire l’objet d’un recours au Tribunal fédéral doivent contenir les motifs déterminants de fait et de droit.… Lire la suite