Un cheval est-il un animal vivant en milieu domestique ?

TF, 19.09.2017, 4A_241/2016*

Un cheval de loisir gardé dans une écurie à quelques kilomètres de l’habitation du détenteur est un animal « qui vit en milieu domestique » selon les art. 42 al. 3 et 43 al. 1bis CO, pour autant que sa prise en charge au quotidien soit assurée par le détenteur ou sa famille. Ainsi, le critère de la proximité géographique entre le détenteur et l’animal est secondaire par rapport à celui du lien affectif envers l’animal.

Faits

Suite à une collision entre deux voitures sur l’autoroute, une jument transportée dans une remorque tirée par l’une des voitures est blessée. Ne disposant pas eux-mêmes d’une écurie, les propriétaires de la jument étaient en train de l’amener à l’écurie où elle se trouve habituellement, à 6 kilomètres de leur habitation. L’une des propriétaires se charge de la jument au quotidien et la monte régulièrement.

Les propriétaires réclament au Bureau national d’assurance (l’autre véhicule impliqué étant étranger, cf. art. 74 al. 2 let. a LCR) la réparation des frais de traitement (art. 42 al. 3 CO), de la valeur affective (art. 43 al. 1bis CO) et de la moins-value de l’animal (art. 41 al. 1 CO), en intentant une action partielle pour un montant de près de CHF 83’000.… Lire la suite

La violation du principe de célérité et la réduction des frais de procédure

ATF 143 IV 373 | TF, 13.07.17, 6B_934/2016*

La conséquence d’une violation du principe de célérité consiste le plus souvent en une réduction de la peine, parfois en une renonciation à toute peine et, en cas de préjudice particulièrement grave, en un classement de la procédure. Ce n’est que dans l’hypothèse d’un classement, d’un acquittement ou d’actes de procédure erronés que le CPP prévoit la réduction des frais de procédure au bénéfice du prévenu. Même la réduction d’une peine privative de liberté prononcée avec sursis constitue une forme de réparation de la violation du principe de célérité. Le fait qu’un prévenu ait déjà été privé de sa liberté par l’exécution d’une mesure n’est pas pertinent.

Faits

Suite à diverses infractions, un jeune adulte est condamné par le Tribunal pénal du canton de Bâle-Campagne à une peine privative de liberté. Dans la mesure où près de quatre ans se sont déroulés entre l’arrestation du prévenu et la mise en accusation, le Tribunal constate une violation du principe de célérité et réduit la peine privative de liberté de deux ans et demi à deux ans uniquement.

Le Tribunal ordonne en outre une mesure thérapeutique stationnaire pour jeunes adultes et reporte l’exécution de la peine privative de liberté.… Lire la suite

La prorogation en faveur du tribunal de commerce et la compétence ratione loci

ATF 143 III 558 | TF, 21.09.2017, 4A_131/2017*

L’élection de compétence en faveur du tribunal de commerce est nulle en tant qu’elle concerne la compétence matérielle. S’agissant de la compétence territoriale, il sied d’interpréter le contrat (le cas échéant selon le principe de la confiance) pour déterminer si les parties, en connaissance de la nullité de la prorogation en faveur du tribunal du commerce, auraient élu un autre for et si oui lequel.

Faits

Un contrat de courtage exclusif en lien avec la vente d’un immeuble situé à Herrliberg (district de Meilen, canton de Zurich) prévoit la compétence du Tribunal de commerce zurichois. L’une des parties est domiciliée à Monaco, l’autre en Suisse. Un litige survient par la suite. L’une des parties ouvre alors action devant le Tribunal d’arrondissement de Zurich, lequel se déclare incompétent. Sur recours, l’Obergericht renvoie l’affaire au Tribunal d’arrondissement de Zurich pour décision au fond.

Saisi de la cause, le Tribunal fédéral doit déterminer quelle portée doit être donnée à une clause d’élection de for en faveur du Tribunal de commerce s’agissant de la compétence territoriale.

Droit

A teneur de jurisprudence, les clauses d’élection de compétence matérielle sont invalides. En particulier, lorsque seul le défendeur est inscrit au registre du commerce, le demandeur peut agir soit devant le tribunal de commerce soit devant le tribunal ordinaire (art.Lire la suite

Le seuil d’exemption concernant la compensation des avantages et inconvénients résultant des mesures d’aménagement

ATF 143 II 568TF, 16.08.2017, 1C_132/2015*

Une limite d’exemption de CHF 100’000 en ce qui concerne la compensation des avantages et inconvénients résultant des mesures d’aménagement viole l’art. 5 al. 1quinquies LAT ainsi que le principe d’égalité de traitement. Le Tribunal fédéral annule la disposition cantonale tessinoise prévoyant une telle limite.

Faits

Le canton du Tessin adopte une nouvelle loi sur le développement territorial. Un chapitre de cette loi prévoit un régime de compensation des avantages et inconvénients résultant des mesures d’aménagement, en application de l’art. 5 LAT. Les taux d’imposition sont de 20 % ou 30 % suivant le type d’avantage dont bénéficie le propriétaire. L’art. 93 de la loi définit la notion d’avantage majeur comme étant une augmentation de valeur supérieure à CHF 100’000.-, et précise expressément qu’une augmentation inférieure à ce montant est exemptée de toute contribution.

Deux citoyens forment recours contre cette loi en concluant à l’annulation de la disposition précitée. Le Tribunal fédéral doit vérifier si la norme tessinoise est conforme à l’égalité de traitement (art. 8 Cst.) et au principe de la force dérogatoire du droit fédéral (art. 49 Cst.).

Droit

De jurisprudence constante, le Tribunal fédéral fait preuve de retenue dans le contrôle abstrait des normes.… Lire la suite

Le dépôt d’écritures judiciaires sous format électronique

Arrêt de la Cour de justice de Genève, 16.10.2017, ACJC/1341/2017

Lorsqu’une partie dépose ses écritures judiciaires sous format électronique, l’autorité ne peut exiger qu’elle ne lui adresse ultérieurement une version papier ni qu’elle ne lui verse des frais judiciaires pour l’impression des documents.

Faits

Par courrier électronique sécurisé du 1er mai 2017, une partie à une procédure civile dépose auprès du Tribunal de première instance genevois une demande en paiement de sept pages et un chargé de titres de 87 pages, tous deux munis de la signature électronique.

Par décision incidente, le Tribunal invite la partie à déposer sa demande et son chargé sur support papier (un exemplaire pour le Tribunal et autant d’exemplaires que de parties adverses) faute de quoi la partie devra s’acquitter de frais judiciaires à hauteur de CHF 238.- correspondant au coût d’impression des deux jeux d’écritures et de pièces.

La partie recourt contre cette décision incidente auprès de la Cour de justice, laquelle est amenée à déterminer si le Tribunal de première instance était légitimé à demander une version papier des écritures déposées sous format électronique ou au besoin à condamner la partie à des frais d’impression.

Droit

La Cour de justice commence par relever que l’art.Lire la suite