La même procédure exigée lors d’une action reconventionnelle (art. 224 al. 1 CPC)

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ATF 143 III 506 | TF, 13.06.16, 4A_576/2016*

Lors d’une procédure simplifiée, l’art. 224 al. 1 CPC n’autorise pas le dépôt d’une action reconventionnelle soumise à la procédure ordinaire. Ces principes ne s’appliquent toutefois pas pour une action partielle et une demande reconventionnelle visant à faire constater l’inexistence de l’entier de la dette et dont la valeur litigieuse dépasse CHF 30’000. Dans ce cas, les deux prétentions s’examinent en procédure ordinaire.

Faits

Une personne fait valoir contre un assureur une action partielle limitée à CHF 30’000. L’assureur dépose une action reconventionnelle et conclut à ce que le tribunal constate l’inexistence de l’ensemble de la créance du demandeur qui se monte au minimum à CHF 750’000. Le Tribunal de première instance déclare irrecevable la demande reconventionnelle, car l’art. 224 al. 1 CPC n’autorise une demande reconventionnelle que si elle est soumise à la même procédure. Le Tribunal cantonal de Lucerne confirme le jugement de première instance. L’assureur saisit alors le Tribunal fédéral qui doit se pencher sur l’admissibilité d’une action reconventionnelle.

Droit

Aux termes de l’art. 224 al. 1 CPC, « le défendeur peut déposer une demande reconventionnelle dans sa réponse si la prétention qu’il invoque est soumise à la même procédure que la demande principale ». Lorsque la prétention principale est soumise à la procédure simplifiée, la doctrine unanime soutient ainsi qu’un défendeur ne peut pas déposer une action reconventionnelle dont la valeur litigieuse dépasse CHF 30’000 et qui serait donc soumise à la procédure ordinaire. Le Tribunal fédéral confirme cette conception ; la systématique, l’historique et le sens de la loi ne contredisent pas cette interprétation. En revanche, il laisse ouverte la question de savoir s’il est possible en procédure ordinaire de faire valoir une action reconventionnelle soumise à la procédure simplifiée.

Dans une seconde étape, le Tribunal fédéral s’interroge si ces principes sont aussi valables en cas d’action partielle et d’une demande reconventionnelle portant sur la constatation de l’inexistence de l’ensemble de la dette. La doctrine majoritaire et la jurisprudence du Tribunal cantonal de Schwyz considèrent qu’il n’est pas non plus possible de déposer une action reconventionnelle portant sur la constatation négative d’une dette dont la valeur litigieuse dépasserait CHF 30’000. Une opinion minoritaire, dont celle du Prof. Heinzmann, soutient le contraire.

Le Tribunal fédéral se rallie à l’opinion minoritaire. De manière générale, le Tribunal fédéral reconnaît l’intérêt à faire constater l’inexistence d’une dette. Le Message du CPC a ainsi expressément prévu que le défendeur d’une action partielle peut déposer une action reconventionnelle pour faire constater l’inexistence de l’entier de la dette. Le Tribunal fédéral rappelle également qu’en droit du travail, l’ancienne procédure considérait que l’action en constatation de l’inexistence de dette n’est pas une action reconventionnelle indépendante qui concerne une nouvelle prétention dissociée de l’action principale.

Le Tribunal fédéral estime donc qu’un défendeur peut déposer contre une action partielle soumise à la procédure simplifiée une action reconventionnelle visant la constatation de l’inexistence de l’entier de la dette, même si sa valeur litigieuse dépasse CHF 30’000. Dans ce cas, la prétention principale (action partielle) et l’action reconventionnelle doivent être jugées en appliquant les règles de la procédure ordinaire.

Par conséquent, le Tribunal fédéral admet le recours.

Proposition de citation : Julien Francey, La même procédure exigée lors d’une action reconventionnelle (art. 224 al. 1 CPC), in : www.lawinside.ch/499/

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