La prescription de l’obligation de restituer les rétrocessions

ATF 143 III 348 | TF, 16.06.2017, 4A_508/2016*

Faits

En 1994-1995, une association mandate une société de courtage afin de développer et organiser un concept d’assurance pour ses membres. La société de courtage conclut alors divers contrats d’assurance pour l’association. Le 4 mars 2005, l’association apprend que la société de courtage a perçu des commissions occultes des sociétés d’assurance et conteste immédiatement leur légitimité. Après des pourparlers infructueux, l’association résilie le contrat avec la société de courtage le 19 août 2005.

Entre 2006 et 2007, l’association dépose une quinzaine de réquisitions de poursuite à l’encontre de la société de courtage, puis ouvre action le 1er juin 2007. Sur appel déposé par la société de courtage, la Cour de justice considère que les rétrocessions sont soumises à un délai de prescription de dix ans courant dès la fin du mandat.

La société de courtage exerce un recours auprès du Tribunal fédéral qui doit statuer sur le délai de prescription applicable aux rétrocessions ainsi que sur son point de départ.

Droit

L’art. 400 al. 1 CO prévoit que le mandataire est tenu, à la demande du mandant, de lui rendre en tout temps compte de sa gestion et de lui restituer tout ce qu’il a reçu de ce chef, à quelque titre que ce soit.… Lire la suite

L’action partielle lors d’une lésion corporelle

ATF 143 III 254TF, 24.05.17, 4A_26/2017*

Faits

Une personne subit un accident de la route et dépose une action partielle en dommages-intérêts et en réparation du tort moral contre l’assureur RC du responsable. Le Tribunal de commerce de Zurich admet la demande. L’assureur recourt au Tribunal fédéral en estimant que les conclusions de l’action partielle ne sont pas suffisamment déterminables. Le Tribunal fédéral doit ainsi examiner les conclusions à prendre lors d’une action partielle.

Droit

Une seule conclusion tendant au paiement d’une somme d’argent n’est en soi pas individualisable et peut reposer sur plusieurs objets du litige. Dans une telle hypothèse, le principe d’individualisation des conclusions n’est pas respecté. En revanche, une conclusion est sans autre admise si elle repose sur un seul objet du litige. Déterminer s’il existe plusieurs objets du litige dépend de l’état de fait et de la prétention matérielle invoquée. En l’espèce, le demandeur s’est fondé sur l’art. 46 CO (dommage en cas de lésion corporelle) et sur l’art. 47 CO (tort moral).

La doctrine distingue l’action partielle improprement dite et proprement dit. Par une action partielle proprement dite, le demandeur fait valoir un montant partiel de l’ensemble de son préjudice.… Lire la suite

Arrêt Gaba (2/2) : L’affectation notable de la concurrence

ATF 143 II 297 – TF, 28.06.2016, 2C_180/2014*

Faits

La société suisse Gaba International AG (“Gaba“) produit et commercialise des produits d’hygiène dentaire, en particulier les produits Elmex. Elle conclut avec la société autrichienne Gebro Pharma GmbH (“Gebro”) un contrat portant sur la fabrication et la distribution en Autriche de ces produits. A teneur de ce contrat, Gebro s’engage à ne déployer son activité qu’en Autriche et à n’exporter ni directement ni indirectement les produits Elmex hors d’Autriche. Gaba s’engage pour sa part à empêcher par tous les moyens à sa disposition l’exportation des produits Elmex vers l’Autriche et à n’y distribuer lesdits produits ni directement ni indirectement.

La COMCO sanctionne Gaba pour restriction illicite de la concurrence. Gaba forme recours auprès du Tribunal administratif fédéral, puis du Tribunal fédéral.

Droit

Aux termes de l’art. 5 al. 1 LCart, les accords qui affectent de manière notable la concurrence sur le marché de certains biens ou services et qui ne sont pas justifiés par des motifs d’efficacité économique, ainsi que tous ceux qui conduisent à la suppression d’une concurrence efficace, sont illicites.

La recourante fait valoir que la concurrence n’est pas affectée par le contrat litigieux, puisque celui-ci n’a eu aucun impact effectif sur la concurrence.… Lire la suite

Un message publicitaire UDC constitutif d’une discrimination raciale

ATF 143 IV 193 | TF, 13.04.2017, 6B_610/2016*

Faits

Dans le contexte de la campagne de l’UDC pour « stopper l’immigration de masse », le parti politique publie sur son site internet et dans certains journaux une annonce publicitaire intitulée « voici les conséquences d’une immigration de masse incontrôlée ». En dessous du titre, en grandes lettres blanches sur fond noir, le message principal indique que « des Kosovars poignardent un Suisse » et que « quiconque ne le souhaite pas signe l’initiative populaire contre l’immigration de masse ». L’affiche décrit en outre un incident saurvenu avec des Kosovars : « Deux compagnons de lutte suisse, Roland (38) et Kari (45), sont assis le lundi 15 août sur une terrasse à Interlaken. Soudain, un taxi s’arrête devant eux et deux Kosovars (33 et 31 ans) en sortent. “Suisses de merde ! Salauds” disent-ils. Kari, douze fois titré en lutte suisse, répond alors “à quoi cela mène-t-il ?”. Un des deux Kosovars sort un couteau et le plante dans la gorge de Kari ».

Le Tribunal régional de Berne-Mittelland a reconnu le secrétaire général de l’UDC au moment de la publication de l’annonce, ainsi que sa suppléante, coupables de discrimination raciale (art. 261bis CP). La Cour d’appel du canton de Berne a confirmé les verdicts de culpabilité.… Lire la suite

La garantie de citation régulière (art. 27 al. 2 let. a LDIP)

ATF 143 III 225 | TF, 30.03.2017, 5A_889/2016*

Faits

Une société sise en Arabie saoudite forme devant le Tribunal de première instance de Dubaï une demande en paiement de CHF 150’000.- contre une société dont le siège est à Zoug en Suisse.

Le Tribunal dubaïote notifie les pièces du dossier à la défenderesse en Suisse et requiert de cette dernière qu’elle en accuse réception, ce à quoi la société ne donne pas suite. Un jugement par défaut est rendu par le Tribunal dubaïote, qui condamne la défenderesse à verser à la demanderesse le montant réclamé.

Sur requête de la demanderesse, le Tribunal de première instance de Zoug déclare le jugement dubaïote exécutoire en Suisse. Sur recours de la défenderesse, le Tribunal cantonal zougois refuse la reconnaissance du jugement dubaïote. Le Tribunal cantonal considère que la défenderesse n’a pas été citée régulièrement, car elle ne se serait pas vue communiquer par le Tribunal dubaïote une citation à comparaître ou un délai pour répondre à la demande en paiement (art. 27 al. 2 let. a LDIP).

La demanderesse forme un recours en matière civil au Tribunal fédéral qui doit déterminer si la défenderesse a été citée régulièrement dans la procédure judiciaire à Dubaï, respectivement si le jugement dubaïote doit être reconnu en Suisse (art.Lire la suite