La levée du secret médical

ATF 142 II 256TF, 16.06.2016, 2C_215/2016*

Faits

Pendant sa grossesse, une patiente découvre qu’elle est atteinte du sida et décède quelques jours plus tard. Les héritiers intentent une action en responsabilité à l’égard du médecin. Dans le cadre de ce procès, se pose la question de savoir si la patiente et son mari avaient indiqué au médecin qu’un test de séropositivité serait inutile. Afin de prouver ce fait, le médecin actionné propose d’entendre comme témoin un docteur qui avait été auparavant consulté par l’époux. Le docteur appelé à être entendu comme témoin demande à l’autorité compétente de lever son secret pour pouvoir témoigner, demande qui est admise.

L’époux exerce un recours auprès du Tribunal administratif de Saint-Gall contre cette décision de libération du secret. Le tribunal lui donne raison et annule la décision de l’autorité inférieure.

Le médecin actionné exerce alors un recours en matière de droit public auprès du Tribunal fédéral, qui est amené à se prononcer sur les conditions de la levée du secret médical dans le cadre d’un témoignage.

Droit

En premier lieu, le Tribunal fédéral se penche sur la question de la qualité pour recourir d’une partie au procès pour demander la levée du secret auquel est soumis un témoin potentiel.… Lire la suite

Le concours rétrospectif (art. 49 al. 2 CP)

ATF 142 IV 265 | TF, 30.06.16, 6B_829/2014*

Faits

Par jugement entré en force en 2011, un prévenu est condamné à 8 ans de peine privative de liberté pour avoir notamment commis une tentative de meurtre. En 2013, le tribunal d’arrondissement de Bucheggberg-Wasseramt le condamne pour divers délits, dont des viols sur sa compagne et des infractions à la LStup. Ces faits se sont déroulés en 2008 et donc avant le jugement de 2011. En application de l’art. 49 al. 2 CP (concours rétrospectif), le tribunal le condamne à une peine complémentaire de 4 ans de prison. Contre ce jugement, le prévenu recourt au Tribunal cantonal puis au Tribunal fédéral qui doit clarifier la méthode de calcul d’une peine complémentaire (art. 49 al. 2 CP).

Droit

En cas de peines de même genre, le tribunal condamne le prévenu à la peine de l’infraction la plus grave et l’aggrave d’au maximum la moitié (art. 49 al. 1 CP ; principe d’aggravation ; Asperationsprinzip). « Si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l’auteur a commise avant d’avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l’auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l’objet d’un seul jugement » (art.Lire la suite

L’envoi par fax d’une opposition à une ordonnance pénale (art. 110 et 354 CPP)

ATF 142 IV 299TF, 28.06.2016, 6B_1154/2015*

Faits 

Suite à sa condamnation par ordonnance pénale, un prévenu détenu en Allemagne forme opposition par le biais de son avocat. L’opposition est envoyée par fax. Le ministère public constate que l’opposition n’est pas valable. Le prévenu recourt contre cette décision jusqu’au Tribunal fédéral. Celui-ci déclare le ministère public incompétent pour constater l’invalidité de l’opposition (TF, 16.12.2014, 6B_756/2014) et renvoie la cause à l’autorité précédente pour nouvelle décision. Le Tribunal pénal, puis le Tribunal cantonal sur recours constatent à nouveau l’invalidité de l’opposition. Le prévenu forme alors un recours en matière pénale au Tribunal fédéral, qui doit déterminer si l’envoi de l’opposition par fax satisfait aux exigences de forme légales, si l’ordonnance pénale aurait dû contenir plus d’indications au sujet de la forme et de l’envoi de l’opposition et si le ministère public aurait dû accorder au prévenu un délai de grâce pour faire parvenir son opposition sous une autre forme.

Droit

Le prévenu peut faire opposition à une ordonnance pénale par écrit et dans les dix jours devant le ministère public (art. 354 al. 1 CPP). Lorsque la loi exige une requête écrite, celle-ci doit être datée et signée (art.Lire la suite

La notification fictive d’une ordonnance pénale (art. 85 al. 4 let. a CPP)

ATF 142 IV 286TF, 27.07.2016, 6B_110/2016*

Faits

Un automobiliste provoque un accident le 30 août 2013. Suite à l’ouverture de la procédure pénale, le ministère public adresse en février 2014 un courrier à l’automobiliste pour réunir certaines informations médicales. Le ministère public rend une ordonnance pénale contre l’automobiliste le 22 mai 2014 pour infraction à l’art. 91 LCR (art. 352 CPP).

Une tentative infructueuse de notification de l’ordonnance pénale par lettre signature a lieu le 23 mai 2014. Lors de cette tentative, la Poste dépose une invitation à retirer l’envoi dans la boite aux lettres de l’automobiliste. Celui-ci ne retire pas l’ordonnance pénale.

L’automobiliste prend connaissance de l’ordonnance pénale le 13 juin 2014 et s’y oppose le 14 juin 2014. Les instances cantonales considèrent que l’ordonnance pénale a été notifiée de manière fictive et par conséquent, déclarent l’opposition tardive et la condamnation en force.

L’automobiliste forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Celui-ci doit déterminer si la notification fictive de l’ordonnance pénale est valablement intervenue.

Droit

Selon l’art. 354 al. 1 CPP, l’opposition contre l’ordonnance pénale doit être formée dans les dix jours. Si le dernier jour du délai est un jour férié selon le droit fédéral ou cantonal, le délai expire le premier jour ouvrable qui suit (art.Lire la suite

Le droit à l’oralité des débats devant l’autorité de protection de l’adulte et de l’enfant

ATF 142 I 188TF, 02.06.2016, 5A_724/2015*

Faits

L’autorité de protection de l’enfant et de l’adulte retire à un couple la garde de leurs trois enfants et les place dans un foyer. Le tribunal administratif cantonal rejette le recours formé par les parents contre cette décision.

Se prévalant de l’art. 6 ch. 1 CEDH, les parents recourent au Tribunal fédéral. Ils reprochent aux instances précédentes d’avoir violé leur droit à un procès équitable notamment en les privant de leur droit  à la tenue d’une audience publique et à l’oralité des débats. Ils concluent donc à l’annulation de l’arrêt et au renvoi de la cause à l’instance précédente.

Sur la base de l’art. 6 ch. 1 CEDH, le Tribunal fédéral doit déterminer si en l’espèce les parents auraient dû bénéficier d’un droit à la tenue d’une audience publique et à l’oralité des débats.

Droit

Dans un premier temps, le Tribunal fédéral rappelle que l’art. 6 ch. 1 CEDH consacre explicitement un droit à la publicité des débats : « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement ».

Se fondant sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, le Tribunal fédéral considère que le droit à la publicité des débats a pour but d’empêcher toute forme de justice secrète et de permettre un contrôle démocratique du travail des autorités.… Lire la suite