L’avocat en retard à l’audience pénale

ATF 145 I 201TF, 21.03.2019, 6B_1298/2018*

Il peut y avoir formalisme excessif lorsqu’un tribunal refuse de laisser un avocat plaider en raison du retard de celui (en l’espèce, 17 minutes), notamment lorsque le tribunal dispose du temps nécessaire pour écouter la plaidoirie de l’avocat, qu’il sait que celui-ci va venir plaider et que les conséquences du défaut de représentation sont sévères.

Faits

Un prévenu forme opposition à une ordonnance pénale rendue par le Ministère public genevois. Ce dernier maintient son ordonnance et la transmet au Tribunal de police.

Le Tribunal de police fixe une audience et convoque le prévenu personnellement. L’avocat du prévenu sollicite le report de l’audience au motif qu’il n’a pas réussi à joindre son client pour l’informer de l’audience. Suite au refus du report, l’avocat informe le Tribunal de police qu’il sera excusé à l’audience par son avocate stagiaire qui sollicitera une attestation de plaidoirie.

Le jour de l’audience, l’avocate stagiaire arrive avec 17 minutes de retard croyant que l’audience était fixée à 9h30 au lieu de 9h00. Elle émet le souhait de parler au Président du Tribunal qui est encore dans la salle d’audience, ainsi que sa greffière, l’audience suivante étant agendée à 10h00.… Lire la suite

Le conflit de compétence entre le Ministère public et le Tribunal des mineurs

ATF 145 IV 228TF, 04.03.19, 1B_517/2018*

Les règles relatives à la compétence et au déroulement de la procédure de contestation d’un for s’appliquent également en cas de conflit de compétence matérielle. Puisqu’un Procureur général est institué dans le canton de Vaud, il lui appartient de statuer sur un recours formé contre le refus du Ministère public vaudois de se dessaisir en faveur de la juridiction des mineurs (cf. art. 40 al. 1 CPP). La Chambre des recours pénale n’est pas compétente dans cette hypothèse et doit, le cas échéant, transmettre le recours à l’autorité compétente (art. 91 al. 4 CPP).

Faits

En juin 2016, le Tribunal des mineurs vaudois débute l’instruction d’une enquête contre un mineur né en octobre 1998 pour notamment vol et violation de domicile. Le mineur est renvoyé en jugement devant le Tribunal des mineurs.

En mai 2018, le Ministère public vaudois ouvre deux instructions à l’encontre du même prévenu – entre autres – à la suite de brigandages commis durant le même mois et de cambriolages en 2018, les deux causes étant ensuite jointes. Le défenseur d’office nommé par le Ministère public demande le déssaisissement du Ministère public en faveur de la juridiction des mineurs dans l’une des deux causes, au vu de la procédure susmentionnée, encore pendante devant cette juridiction.… Lire la suite

La transmission spontanée de données personnelles relevant d’une procédure pénale

ATF 145 IV 80TF, 27.12.2018, 6B_91/2018*

L’art. 96 CPP permet la transmission spontanée par l’autorité pénale de données personnelles issues de la procédure pénale aux autorités administratives ou civiles dans les limites de l’art. 101 al. 2 CPP, c’est-à-dire lorsqu’aucun intérêt privé ou public prépondérant ne s’y oppose.

Faits

Lors d’une enquête pénale, le Ministère public met sous séquestre CHF 7’000 que le prévenu a gagné deux jours avant au casino. Constatant que le registre des poursuites du prévenu contient plusieurs actes de défaut de biens, le Ministère public informe l’Office des poursuites de l’argent séquestré. Sur demande de celui-ci, le Ministère public transfère l’argent séquestré à l’Office qui l’inclut dans la procédure de saisie concernant le prévenu.

Contre cette décision du Ministère public de transférer l’argent à l’Office des poursuites, le prévenu recourt auprès de l’Obergericht de Zurich, recours qui est rejeté (pour la décision cantonale, voir Beschluss des Obergerichts vom 5. Dezember 2017, UH170287-O/U/TSA). Par la suite, le prévenu recourt au Tribunal fédéral et demande le transfert des CHF 7’000 à son avocat.

Le Tribunal fédéral est amené à trancher la question de savoir si le droit de divulguer des données personnelles pour permettre leur utilisation dans une “autre procédure pendante” prévu à l’art.Lire la suite

Données Falciani : demande d’entraide internationale en matière pénale formulée par la Grèce

TPF, 17.07.2018, RR.2017.338

En matière d’entraide internationale pénale, un État adopte un comportement contraire au principe de la bonne foi s’il formule une demande d’entraide sur le fondement de données volées en Suisse ou à l’étranger. En la présence de motifs fondés qui laissent soupçonner que la demande d’entraide se base sur des données volées, l’autorité requise est tenue de les dissiper. À défaut, l’entraide doit être rejetée.

Faits

Les autorités pénales grecques mènent une enquête pour corruption d’agents publics. Dans ce cadre, elles sollicitent de la Suisse l’entraide internationale en matière pénale et demandent la communication de renseignements relatifs à un compte ouvert auprès d’une banque genevoise. En effet, un pot-de-vin aurait été versé sur ce compte.

Le détenteur du compte soulève que la demande d’entraide grecque serait fondée sur les données bancaires volées par Hervé Falciani et que la demande devrait, dès lors, être rejetée. Il s’avère en effet que l’identité du détenteur du compte se trouve parmi les données Falciani sur la “Liste Lagarde”.

Nonobstant ce fait, le Ministère public de la Confédération (MPC), qui estime que la demande grecque ne serait pas fondée sur les données Falciani, accorde l’entraide aux autorités grecques.

Contre cette décision, le détenteur du compte forme un recours au Tribunal pénal fédéral.… Lire la suite

L’inexploitabilité de la vidéosurveillance d’employés par la police

ATF 145 IV 42 | TF, 20.12.2018, 6B_181/2018*

La mise en place d’une vidéosurveillance par la police constitue une mesure de contrainte qui aurait dû être ordonnée par le ministère public avec l’aval du tribunal de mesure de contrainte. L’accord de l’employeur, qui désire surveiller ses employés suspectés de vol, ne constitue pas un consentement à la mise en place d’une telle mesure. Dès lors que la police a installé la vidéosurveillance sans respecter ces exigences légales, les informations recueillies sont absolument inexploitables et doivent être détruites. 

Faits

Un gérant d’une Sàrl dépose une plainte pénale contre inconnu en raison de soupçons de vol d’argent liquide dans la caisse de son entreprise. La police installe une vidéosurveillance dans les locaux de l’entreprise avec l’accord des deux gérants de la société, mais sans en informer les employés.

Grâce à cette vidéosurveillance, le Ministère public du canton de Soleure dresse un acte d’accusation contre le voleur visible sur les vidéos. Alors que le tribunal de première instance l’acquitte, l’Obergericht le condamne. En effet, selon la seconde instance cantonale, la vidéosurveillance installée par la police ne constitue pas une mesure de contrainte au sens de l’art. 280 CPP en raison de l’accord des gérants.… Lire la suite