Entrées par Emilie Jacot-Guillarmod

La validité formelle du séquestre fiscal

ATF 143 III 573 | TF, 25.09.2017, 5A_394/2017*

Pour valoir ordonnance de séquestre, la demande de sûretés (art. 169 LIFD) des autorités fiscales doit contenir toutes les informations requises par l’art. 274 LP. Si tel n’est pas le cas, il appartient aux autorités en matière de poursuite de le relever dans le cadre de leur contrôle formel.

Faits

Les autorités fiscales adressent une demande de sûretés à un contribuable. Le même jour, elles remettent la demande de sûretés, assimilée à une ordonnance de séquestre, à l’office des poursuites et faillites. Ce document comprend une liste des objets à séquestrer, notamment “les participations” détenues par le contribuable dans une certaine société.

Par la suite, les autorités fiscales réitèrent à l’office la demande d’exécuter le séquestre. Une nouvelle liste des objets à séquestrer remise à l’office dans ce contexte mentionne notamment “le 99.86 % des actions” détenues par le contribuable dans la société susvisée. L’office procède alors au séquestre.

Le contribuable conteste sans succès le séquestre par la voie de la dénonciation (art. 22 LP), subsidiairement de la plainte (art. 17 LP) devant l’autorité de surveillance.

Saisi de la cause, le Tribunal fédéral précise les conditions auxquelles la demande de sûreté des autorités fiscales est assimilée à une ordonnance de séquestre.… Lire la suite

La prorogation en faveur du tribunal de commerce et la compétence ratione loci

ATF 143 III 558 | TF, 21.09.2017, 4A_131/2017*

L’élection de compétence en faveur du tribunal de commerce est nulle en tant qu’elle concerne la compétence matérielle. S’agissant de la compétence territoriale, il sied d’interpréter le contrat (le cas échéant selon le principe de la confiance) pour déterminer si les parties, en connaissance de la nullité de la prorogation en faveur du tribunal du commerce, auraient élu un autre for et si oui lequel.

Faits

Un contrat de courtage exclusif en lien avec la vente d’un immeuble situé à Herrliberg (district de Meilen, canton de Zurich) prévoit la compétence du Tribunal de commerce zurichois. L’une des parties est domiciliée à Monaco, l’autre en Suisse. Un litige survient par la suite. L’une des parties ouvre alors action devant le Tribunal d’arrondissement de Zurich, lequel se déclare incompétent. Sur recours, l’Obergericht renvoie l’affaire au Tribunal d’arrondissement de Zurich pour décision au fond.

Saisi de la cause, le Tribunal fédéral doit déterminer quelle portée doit être donnée à une clause d’élection de for en faveur du Tribunal de commerce s’agissant de la compétence territoriale.

Droit

A teneur de jurisprudence, les clauses d’élection de compétence matérielle sont invalides. En particulier, lorsque seul le défendeur est inscrit au registre du commerce, le demandeur peut agir soit devant le tribunal de commerce soit devant le tribunal ordinaire (art.Lire la suite

Le consentement à la procédure d’appel écrite (CPP)

ATF 143 IV 438 | TF, 13.06.2017, 6B_510/2016*

La juridiction d’appel peut traiter l’appel en procédure écrite sur la base d’un consentement tacite des parties.

Faits

Le Tribunal de première instance de Lenzbourg (Argovie) condamne un prévenu pour plusieurs infractions, notamment en matière de circulation routière. Le prévenu appelle de cette décision.

En seconde instance, la direction de la procédure lui impartit un délai de vingt jours pour indiquer s’il consent à la conduite d’une procédure écrite. A défaut de détermination dans le délai imparti, il sera réputé avoir donné son accord. Le prévenu complète alors la motivation de son appel mais ne se détermine pas expressément sur la conduite de la procédure par écrit. Par la suite, la juridiction d’appel confirme en substance la décision de première instance.

Sur recours du prévenu, le Tribunal fédéral doit notamment déterminer si l’instance précédente pouvait traiter l’appel en procédure écrite sur la base d’un consentement tacite du prévenu.

Droit

La procédure d’appel est en principe orale (art. 405 CPP), les exceptions étant énumérées de manière exhaustive à l’art. 406 CPP. Le tribunal peut notamment traiter l’appel en procédure écrite avec l’accord des parties si la présence du prévenu aux débats d’appel n’est pas indispensable ou si l’appel est dirigé contre des jugements rendus par un juge unique (art.Lire la suite

La saisissabilité d’une rente AVS étrangère

ATF 143 III 385 | TF, 29.05.2017, 5A_630/2016*

Nonobstant la lettre de la loi, une rente vieillesse étrangère est absolument insaisissable (art. 92 al. 1 ch. 9a LP) si elle vise uniquement à garantir le minimum vital du bénéficiaire, de façon analogue à une prestation du premier pilier suisse.

Faits

Les revenus mensuels d’un débiteur suisse se composent d’une rente AVS suisse de CHF 1’400, d’une rente AVS du Liechtenstein de CHF 38 nets et de prestations complémentaires d’un montant de CHF 1’181. L’office des poursuites prononce la saisie de sa rente AVS du Liechtenstein.

L’intéressé forme plainte contre cette décision. Les autorités cantonales de recours confirment dans son principe la décision de saisie.

Saisi de la cause, le Tribunal fédéral doit déterminer si la rente vieillesse du Liechtenstein est absolument insaisissable, à l’instar d’une rente AVS suisse.

Droit

L’art. 92 al. 1 ch. 9a LP prévoit notamment que les rentes au sens de l’art. 20 LAVS sont insaisissables, qu’elles excèdent ou non le minimum vital du débiteur concerné. La lettre de la loi limite clairement l’application de cette disposition aux rentes versées en vertu du droit suisse. Cela étant, on peut s’écarter du texte légal lorsque des raisons sérieuses indiquent que celui-ci n’exprime pas de façon satisfaisante la ratio legis et/ou la volonté du législateur.… Lire la suite

Acquis de Schengen : Condamnation pour séjour illégal en cas de concours d’infractions

ATF 143 IV 264 – TF, 16.05.2017, 6B_366/2016*

En cas de concours entre le séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEtr) et l’interdiction de périmètre prononcée en lien avec la procédure de renvoi (art. 74 al. 1 let. b ou c cum 119 al. 1 LEtr), une sanction pénale n’est admissible que dans les limites de la Directive européenne 2008/115/CE (acquis de Schengen). Par opposition, lorsque le séjour illégal entre en concours avec une interdiction de périmètre visant à préserver l’ordre et la sécurité publics (art. 74 al. 1 let. a cum 119 al. 1 LEtr), le cas est soustrait au champ d’application de cette Directive.

Faits

Un demandeur d’asile voit sa requête rejetée. Par la suite, il fait l’objet d’une procédure pénale notamment pour séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEtr) et non-respect d’une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 74 cum 119 al. 1 LEtr). Il est entièrement acquitté en première instance. Sur appel du Ministère public, la Cour de Justice genevoise l’acquitte du chef de séjour illégal, le reconnaît coupable de non-respect d’une interdiction de pénétrer dans un région déterminée et l’exempte de toute peine.… Lire la suite