Impossibilité de contacter le prévenu et renonciation implicite à l’appel

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ATF 149 IV 259 | TF, 17.04.2023, 6B_1433/2022*

Le prévenu qui souhaite former un appel doit démontrer de manière continue, pendant la procédure d’appel, sa volonté que la juridiction d’appel examine la décision de première instance. Le prévenu est réputé renoncer implicitement à la procédure d’appel s’il refuse de communiquer son lieu de séjour ou que celui-ci reste inconnu et qu’il est impossible, même pour son défenseur, de le contacter.

Faits

Un prévenu est condamné en première instance pour contraintes, menaces et insoumission répétée à des décisions de l’autorité. À la suite de la notification du dispositif du jugement, le prévenu informe son conseil de sa volonté de former appel. Depuis cet ultime contact, le défenseur du prévenu n’est plus parvenu à communiquer avec lui. Faute d’indications contraires du prévenu depuis lors, le conseil forme appel.

A la suite de la convocation aux débats devant l’instance d’appel, le défenseur du prévenu demande la fixation d’un délai pour contacter le prévenu afin de confirmer sa volonté de poursuivre la procédure devant l’instance d’appel. Faute pour le défenseur du prévenu d’être parvenu à le contacter, l’instance d’appel considère que l’appel a été retiré et déclare le jugement de première instance exécutoire. Contre cette décision, le défenseur du prévenu intente un recours en matière pénale auprès du Tribunal fédéral, lequel est amené à préciser sa jurisprudence relative à la renonciation implicite à l’appel en cas d’impossibilité de communiquer avec le prévenu et faute de connaissance de son lieu de séjour.

Droit

L’art. 386 al. 2 CPP prévoit que quiconque a interjeté un recours peut le retirer avant la clôture des débats (s’agissant d’une procédure orale) ou avant la clôture de l’échange de mémoires et le terme fixé pour apporter des compléments de preuves ou compléter le dossier (s’agissant d’une procédure écrite). L’art. 407 al. 1 let. c CPP prévoit quant à lui que l’appel est réputé retiré si la partie qui l’a déclaré ne peut pas être citée à comparaître. Le retrait est en principe définitif (art. 386 al. 3 CPP).

Le Tribunal fédéral souligne d’abord que la procédure d’appel, contrairement à la procédure de première instance, est une procédure à la disposition des parties. Partant, il faut que l’appelant démontre, de manière continue pendant la procédure d’appel, sa volonté que la juridiction d’appel examine la décision de première instance. La simple communication du prévenu à son défenseur de son désaccord avec le jugement de première instance ne suffit pas pour démontrer de manière continue sa volonté qu’une procédure d’appel ait lieu.

Ensuite, le Tribunal fédéral rappelle que la fiction de retrait de l’appel au sens de l’art. 407 al. 1 let. c CPP est applicable si l’appelant doit se présenter personnellement à l’audience d’appel et que celui-ci refuse de communiquer son lieu de séjour ou que son lieu de séjour est inconnu, de telle sorte que la notification du mandat de comparution est impossible (ATF 148 IV 362).

Bien que l’instance d’appel n’ait pas eu recours à la figure de la fiction de retrait de l’appel dans le cas d’espèce, les principes susmentionnés sont applicables. Le défenseur de l’appelant ne disposait d’aucun moyen pour contacter le prévenu et le lieu de séjour du prévenu était inconnu. En outre, comme la procédure d’appel est à la disposition des parties, l’appelant ne peut pas exiger la tenue d’une procédure d’appel et refuser en même temps d’y participer en ne communiquant pas son lieu de séjour. Face à l’impossibilité totale de communiquer avec le prévenu depuis la notification du dispositif du jugement de première instance et faute pour l’appelant d’avoir démontré, de manière continue, sa volonté qu’une procédure d’appel ait lieu, le Tribunal fédéral retient que le prévenu a renoncé implicitement et sans équivoque à l’examen de sa cause par l’instance d’appel.

Le Tribunal fédéral rejette le recours.

Proposition de citation : Victor Sellier, Impossibilité de contacter le prévenu et renonciation implicite à l’appel, in : www.lawinside.ch/1329/